Titre : | Le dilemme afghan (2012) |
Auteurs : | Gilles Dorronsoro, Auteur |
Type de document : | Article : texte imprimé |
Dans : | Etudes (4165, Mai 2012) |
Article en page(s) : | pp. 583-593 |
Langues: | Français |
Catégories : |
[UNESCO] Afghanistan [UNESCO] Politique internationale |
Résumé : | Après l’invasion de l’Afghanistan en 2001, s’est ouverte une longue période de dégradation pratiquement continue de la sécurité. Plutôt que de reconnaître la réalité du problème, la coalition internationale s’est enfermée dans un discours optimiste – et paradoxal – en niant l’existence d’une insurrection organisée tout en accroissant massivement sa présence militaire. On aimerait pouvoir dire que les experts ont joué leur rôle, mais la vérité est celle d’un échec collectif à anticiper les problèmes. Par exemple, Olivier Roy annonce la sortie de l’Afghanistan de l’histoire : il n’y a « plus d’enjeu afghan, sinon symbolique »1. Loin d’être un phénomène isolé, cet aveuglement a été largement partagé et renvoie, selon les cas, aux biais politiques des experts ou aux formes d’autocensure propres à ce milieu. Pourtant, le retour des Taliban était largement prévisible. Ainsi, quand j’ai introduit le terme de « néo-Taliban »2 pendant l’hiver 2002-03, je souhaitais insister sur deux choses. Premièrement, les Taliban existaient encore et, contrairement à l’opinion alors dominante, j’estimais qu’ils avaient un avenir. Deuxièmement, du fait de l’effondrement militaire des Taliban à l’automne 2001, la direction réfugiée à Quetta se réorganisait avec une reprise en main par l’ISI et un fonctionnement plus décentralisé en raison des difficultés de communication entre l’état-major au Pakistan et les groupes combattant à l’intérieur. En quelques années, le piège mis en place par Ben Laden s’est impitoyablement refermé : les Occidentaux, rejetés sans ambiguïté par la population, sont dans une impasse militaire et ne parviennent pas à stabiliser le régime de Hamid Karzaï à Kaboul pour assurer la transition. Dix ans après l’intervention américaine, les Taliban sont le principal acteur politico-militaire du pays et les militants jihadistes les plus radicaux trouvent à nouveau un sanctuaire dans certaines provinces frontalières afghanes. |