Titre : | Une Eglise "en sortie" : la conversion pastorale et catéchétique d'Evangelii gaudium (2015) |
Auteurs : | Enzo Biemmi, Auteur |
Type de document : | Article : texte imprimé |
Dans : | Lumen vitae : revue internationale de catéchèse et de pastorale (2015-n°1, Janvier - février - mars 2015) |
Article en page(s) : | p. 29-42 |
Langues: | Français |
Catégories : |
[UNESCO] synode |
Mots-clés: | Église catholique -- 1990-.... ; Paroisses |
Résumé : |
Evangelii gaudium devait être le document post-synodal sur le thème de la nouvelle évangélisation. En fait, il a largement dépassé la perspective du Synode, en devenant la « charte de base » du pape François, en offrant sa vision de l'Évangile, de l'Église et de l'évangélisation. Le document est construit selon une inclusion : au début, la joie comme fondement de l'annonce ; à la fin, le service de l'Esprit Saint comme raison ultime de l'action ecclésiale. Cette vision confère en même temps au défi de l'évangélisation liberté et gratuité, et définit l'Église comme servante de l'homme et de l'action de Dieu. La clé de compréhension d'Evangelii gaudium est l'appel à la conversion. Le pape François va au-delà de la seule perspective spirituelle (la conversion des personnes individuelles en Église) et rétablit le lien indestructible entre renouveau – conversion – réforme. Chaque aspect de la vie de l'Église est en soi une annonce de l'Évangile ou alors un démenti : la réforme de chaque dimension ecclésiale, qui présuppose la conversion personnelle de chacun, est donc l'aspect qui fait la différence dans la pensée du pape François. Ce dernier restaure ainsi pleinement la visée d'Evangelii nuntiandi de Paul VI. Le pape François choisit le terme de « conversion » pour désigner la tâche ecclésiale de l'annonce, le préférant à celui d'« évangélisation », parce que celui-ci pourrait faire penser qu'il s'agit d'un aspect de la vie de l'Église, de l'une de ses activités parmi d'autres. Mais pour lui, l'Église annonce par tout ce qu'elle est et existe pour annoncer au moyen de la forme (d'où la ré-forme) qu'elle assure dans l'histoire. À l'arrière-fond de cette perspective, les grandes questions de l'annonce sont revisitées : l'accueil dans le contexte culturel actuel riche de contradictions, mais « capax Dei » ; la conviction que l'Esprit Saint est répandu dans tous les cœurs et agit en chaque personne de bonne volonté (la foi élémentaire de Christoph Theobald et la grâce première d'André Fossion) ; la nécessité de l'évangélisation comme acte suprême de gratitude pour le don reçu et d'amour pour tous ; le kérygme comme contenu essentiel de l'annonce (EG, no 164) ; le style d'évangélisation comme diaconie de l'Esprit Saint dans une attitude d'hospitalité pour chaque personne. Evangelii gaudium est un texte qui unit Magistère et prophétie. Nous n'étions plus habitués à une telle association. C'est pourquoi le document devient une stimulation puissante pour allonger le pas, soit dans la pratique ecclésiale d'évangélisation, soit dans la réflexion catéchétique. Gilles ROUTHIER Quel type d'institutionnalité pour l'Église catholique ? Le renouveau de la figure ecclésiale à la lumière de l'exhortation apostolique Evangelii Gaudium Dans Evangelii gaudium, François invite à une conversion pastorale. Certes, elle est conversion spirituelle et intérieure, conversion des attitudes et des pratiques pastorales, mais également des structures ou des figures institutionnelles. Au nombre des institutions appelées à se convertir, il y a la paroisse, mais également la papauté et les structures centrales de l'Église et, corrélativement, les conférences épiscopales appelées à être sujets d'une certaine autorité doctrinale. Cet appel à la reformatio doit être entendu dans le projet plus ample d'inscrire l'Évangile dans le peuple en une période d'« énormes et rapides changements culturels », ce qui conduit à « prêter une constante attention pour chercher à exprimer la vérité de toujours dans un langage qui permette de reconnaître sa permanente nouveauté » (no 41). Cela conduit à une revalorisation du rôle des conférences épiscopales et de la piété populaire. André FOSSION L'évangélisation : « Un constant corps à corps » Evangelii gaudium définit l'évangélisation, dans une formule étonnante, comme « un constant corps à corps ». L'évangélisation ne réside pas d'abord dans l'énoncé d'un message destiné à convaincre. Elle touche avant tout les corps. Elle se ressent dans l'action bienfaisante sur les corps. Elle est sortie de soi à la rencontre physique de l'autre, dans sa chair, pour y imprimer les marques de la tendresse d'un Dieu qui s'est incarné. Le récit évangélique lui-même témoigne du lien indissoluble entre l'action charitable et la proclamation de la Bonne Nouvelle. Aussi, l'Église est-elle appelée à être un corps de charité dans la chair du monde. L'annonce de l'Évangile vient se greffer sur la pratique de cette charité pour en révéler le mystère, l'origine et la fin. L'annonce est elle-même un acte de charité supplémentaire par lequel on offre à l'autre, avec douceur et respect, le meilleur que l'on puisse lui donner : la reconnaissance joyeuse de l'amour de Dieu manifesté en Jésus-Christ et une communion nouvelle en son nom. Étienne GRIEU Évangéliser aux périphéries : oui, mais que veut dire « périphérie » ? La notion de périphérie fait partie depuis le début du vocabulaire du pape François pour parler de la mission de l'Église. Mais que signifie ce terme ? À l'examen, il s'avère plus complexe que ce qu'on pouvait imaginer. C'est en effet à la fois l'organisation humaine lorsqu'elle se montre déshumanisante et ce que celle-ci produit : misère, souffrance, abandon. Si le pape invite à oser rejoindre ces périphéries, c'est qu'il s'agit d'épouser le mouvement par lequel Dieu s'est manifesté : il s'est révélé dans son attention aux humiliés et aux laissés pour compte. À partir de là, il y a de quoi repenser la mission de l'Église, non pas d'abord comme un message à faire passer, mais comme des retrouvailles à vivre entre deux mondes qui s'ignorent et se font peur mutuellement. Frédéric-Marie LE MÉHAUTÉ « Les joies et les espoirs [...] des pauvres surtout et de tous ceux qui souffrent » (GS, n° 1). Audace et fécondité d'un décentrement Écouter la parole des pauvres renouvèle notre vision de l'homme et fait résonner des harmoniques insoupçonnées de la Parole de Dieu. à la croisée des Écritures et de ces paroles humaines muries par l'expérience particulière de la précarité, l'option préférentielle pour les pauvres est invitée à ne pas laisser de côté sa dimension spirituelle. Nourris par cette écoute, l'engagement pour la justice sociale et l'annonce de l'Évangile, loin de s'opposer, se stimulent réciproquement. Yves GUÉRETTE « C'est lorsque je me tais que je suis intéressante » : Les missionnaires urbains envoyés à la rencontre des jeunes adultes de Québec En 2001, l'organisme Mission urbaine a été créé afin que des missionnaires urbains soient envoyés à la rencontre des jeunes de 18 à 35 dans les cafés, les bars et les salles de billard d'une portion de la ville de Québec à forte densité jeunesse. Depuis lors, les missionnaires qui se sont succédé ont favorisé un véritable approfondissement de l'exigence et de l'originalité de l'expérience missionnaire dans les périphéries. Mission urbaine se révèle une saisissante école de la foi et du discipulat dans le cadre de l'action missionnaire. Cet article propose une lecture croisée des observations provenant de la pratique et de la lecture théologique de la mission auprès des jeunes adultes de Luce Dubé, missionnaire urbaine des premières heures, et des extraits de l'exhortation apostolique Evangelii gaudium du pape François. Mgr Laurent ULRICH Une Église « en sortie » : renoncer à certaines pratiques ou composer de nouvelles perspectives ? Face aux défis des grandes transformations sociales qui affectent le monde post-industriel, et multiculturel, les diocèses s'interrogent. Que doivent-ils changer pour faire entendre l'Évangile dans « la société liquide » ? Le modèle paroissial, plus que millénaire, est-il encore adapté ? Comment peut-il faire signe ? Pour répondre à ces questions, les évêques de la province ecclésiastique de Lille, au Nord de la France, ont convoqué un Synode (Concile) provincial. À côté d'une centaine de Synodes diocésains, ou assemblées de genre synodal, tenus en France depuis 1983, cette première expérience interdiocésaine a vocation à voir, derrière les renoncements qui s'imposent, les chances pour un Évangile plus proche de nos contemporains. Martin WERLEN Découvrir ensemble la braise sous la cendre : un style renouvelé d'évangélisation L'Église rencontre aujourd'hui de nombreux défis. Un grand problème est cette incapacité évidente à annoncer aux hommes la joie de l'Évangile. Un regard sur l'histoire de l'Église montre comment des saints ont réagi à des moments de crise : vivre la conversion et y appeler, pas tellement ceux qui sont à l'extérieur, mais bien les membres de l'Église. C'est toujours à nouveau nécessaire pour rester fidèle à Jésus Christ durant les parcours sinueux de l'histoire. Au centre de la foi chrétienne, il y a Dieu et l'homme. La situation du moment est un défi donné par Dieu pour se mettre en route en Église: aller à la rencontre des hommes avec un grand amour et prendre la route avec eux. Luca BRESSAN Du Concile Vatican II à aujourd'hui : le problème de l'annonce à la foi L'annonce de la foi est une question à ce point urgente et fondamentale pour l'Eglise du 20ème (et du 21ème) siècle qu'elle peut être considérée comme le fil conducteur susceptible d'en relire l'histoire et les actions principales. Posée comme défi déjà par la Mission de France /mettre en italique Mission de France/, l'évangélisation prend ensuite la forme d'une demande faite à et sur l'Eglise, jusqu'à devenir en elle-même la question : l'évangélisation comme forme de l'Eglise dans notre postmodernité. Le Magistère du pape François assume la question et construit la réponse à travers des métaphores concrètes, capables d'apport |